Retour au Menu    

Si ces enfants là comprennent la planète, elle a encore sa chance !


Latin ou la Tétine !


Une petite histoire pour ne jamais sous-estimer le savoir d'autrui quel que soit son âge.


Mes thuyas sont malades ! Horreur et damnation ! En promenade champêtre au long des 75 m² de mon domaine, je m'aperçus soudain d'un fort brunissement de leurs rameaux. Que faire ! L'une de mes fillettes qui s'était jointe à moi pour cette inspection dominicale de la propriété me donna la solution : "va chez Truffaut, chez Truffaut y'a tout c'qui faut".
Je suis toujours étonné de cette précoce maturité dans l'analyse des problèmes et l'énoncé des solutions envisageables, surtout de la part d'une enfant de cinq ans. Soit ! Nous voici partis chez le médecin des plantes, toujours de bon conseil selon les dires de ma fillette.
Sur place, nous trouvons rapidement les rayons regorgeant d'engrais et de produits divers destinés aux soins des plantes. Nous trouvons également le professionnel "maison" justement en train de prodiguer ses conseils à un brave quinquagénaire apparemment tout aussi féru de botanique que le vendeur. Son sujet d'inquiétude semble être l'apparition de mousse sur les troncs des arbres de son jardin. Bien entendu, chacun sait que la mousse pousse sur le coté de l'arbre situé au Nord, car l'humidité y est supérieure. (Il faudrait d'ailleurs m'expliquer comment trouver le "coté" d'un arbre).
Le vendeur : -"Pour la bryophyte, qui n'est autre qu'un végétal cryptogame, il vaut mieux utiliser LC Tox Hivers ou à la rigueur Paramouss".
Le client : -"Pour mes Cerasus Avium je ne dis pas, mais pour mes Prunus amygdalus je suis septique, rapport à l'humidité".
Le vendeur : -"Les Rosacées ont tous les mêmes parasites, ont ne peux pas forcément ne planter que des Actinidia Chinensis et éviter ainsi les Oïdiums et autres Didymascella".
Le client : -"C'est sûr. Toujours est-il qu'il me faut un traitement. Je ne peux tout de même pas changer d'hémisphère pour éviter la mousse à l'ubac".
Le vendeur : -"Ecoutez, j'ai testé LC Tox sur des épicéas, des quercus robur, des populus pyramidalis ou des rosa canina, et j'ai toujours eu de bons résultats".

Ma petite fille et moi-même écoutions, médusés, ces propos. Je dois dire qu'il m'a semblé que ma fillette était moins inquiète que moi. Certes, je pensais qu'elle ne pouvait pas encore bien comprendre le sens de cette conversation, et encore moins apprécier l'étendue d'incohérence et de décalage existant entre les mots et les maux. 
Tant d'érudition pour si peu de mousse au pied des arbres. C'est ce qui s'appelle se faire mousser ou je ne m'y connais pas.
Une fois de plus, j'avais sous estimé les ressources de l'intellect et de l'humour enfantin.
Lassée d'attendre la fin hypothétique de ce dialogue latino-phytothérapeutique, nous eûmes la surprise, le client, le vendeur et moi, d'entendre une petite voix articuler clairement et posément du haut de ses cinq ans :
Ma fillette : -"Pour éviter la mousse sur le tronc des arbres, sans cypermètrhine, sans oxylure de cuivre, sans propiconazole, sans aminotriazole, sans thryocyanate de sodium, sans atrazine, dicofol et tutti quanti, il n'y a qu'une seule solution.Tous les six mois, tourner les arbres d'un quart de tour. Et je vous signale que "tutti quanti" n'est pas un désherbant. Tu viens papa, on s'en va".
Moi : -" !   !   ! ".
Elle me dit également sur le chemin du retour, qu'il n'était pas grave de revenir bredouille de chez Truffaut, puisque somme toute, avec quelques grammes de triadiméfon, la maladie de nos thuyas, ci-devant didymascella (enchanté, moi c'est dominique !) serait soignée rapidement.
Je n'ai jamais osé demander à ma fillette où elle s'était procuré ces produits.

Les thuyas vont bien. Merci.


Coralexis Laurion.

Retour au Menu  
© Dominique Vastra 2002